Santé critique parapublique N°1 – 25 août 2010
Edito
Vous avez entre les mains le premier numéro de Santé critique parapublique. Un Santé critique existe déjà depuis de nombreuses années pour les Hospices cantonaux.
Notre nouvelle publication prend le relais du Bulletin de l’APEMS et élargit notre intervention à tout le champ couvert par la CCT du secteur sanitaire parapublic.
A chaque numéro nous mettrons l’accent sur le suivi de la CCT, de son amélioration et sur les problèmes dérivant de son application dans les EMS, les CMS et les hôpitaux régionaux.
Mais nous ne voulons pas en rester là. Dans la mesure de nos modestes moyens, nous nous efforcerons de traiter aussi les questions en lien avec la qualité des prestations offertes dans ce secteur ce qui intègre, bien entendu la quantité et la qualité des dotations, les conditions et l’intensité du travail, les problèmes de santé au travail et les droits fondamentaux du personnel (expression, association, protection contre l’arbitraire, démocratie sociale…).
La CCT a transformé les liens entre les gens et les relations des salarié.e.s avec leur direction et leur hiérarchie. Un bloc du personnel parapublic se configure progressivement face à des directions de plus en plus coordonnées, agissant de manière de plus en plus concertée. Et ce, pas toujours au bénéfice du personnel et des usager.ère.s.
La conclusion et la mise en œuvre de la CCT ont représenté une avancée certaine. Toutefois il reste dans ce secteur des situations et des statuts de précarité. Il faudra éradiquer ces poches de précarité. Nous nous y employons.
Un bulletin tel que celui-ci n’est pas qu’un outil de communication. Il est un moyen d’action et d’organisation. De fait, en prenant la parole, les travailleurs/euses organisé⋅e⋅s construisent du contre-pouvoir.
Donc ce bulletin est le vôtre, le nôtre. Ecrivez-nous, passez-nous les infos, signalez et dénoncez le non respect de la CCT, ce qui vous indigne, ce qui vous révolte, ce que vous souhaitez revendiquer.
Dans ce premier numéro vous trouverez des informations sur les démarches engagées concernant la protection des travailleurs/euses dénonçant des actes de malveillance, le scandale de la rémunération en matière d’annuités dans les hôpitaux de la FHV, la situation sur le front du temps de travail et concernant le salaire afférent aux vacances.
Bonne lecture, bon été.
Protection des travailleurs/euses en cas de dénonciation
de maltraitance et/ou d’actes illicites
Dénoncer les situations et les cas de maltraitance est une obligation légale pour le personnel des établissements du secteur sanitaire. Malheureusement, aucune véritable mesure ou disposition ne protège les personnes qui dénoncent ou signalent des situations embryonnaires ou existantes de maltraitance et/ou des actes illicites.
Aujourd’hui, alors que certains employeurs, sous couvert du devoir de fidélité, se permettent de licencier des travailleurs/euses ayant dénoncé des maltraitances, les organisations patronales (AVDEMS, FEDEREMS, AVASAD, FHV) s’appuyant sur un avis de droit (rédigé par un juriste par ailleurs membre d’un Conseil de fondation d’un établissement sanitaire parapublic), continuent d’estimer suffisantes les protections des dispositions du Code des obligations (CO), et refusent obstinément toute modification de la CCT garantissant une amélioration de la protection des salarié⋅e⋅s lors de dénonciation ou signalement d’actes illicites ou de maltraitance.
Face à l’attentisme et l’immobilisme des employeurs, SUD et les organisations professionnelles et syndicales du secteur sanitaire parapublic ont décidé de poursuivre et d’intensifier les investigations au niveau juridique pour construire l’argumentation qui permettra à terme d’inscrire dans la CCT les clauses offrant des garanties de protection aux salarié⋅e⋅s contre les congés-représailles pour dénonciation de maltraitance.
Cette protection pourrait notamment se concrétiser par l’adjonction à l’article relatif à la résiliation en temps inopportun d’une clause décrétant comme nulle une résiliation donnée durant l’enquête découlant d’une dénonciation ou d’un signalement de maltraitance et/ou d’actes illicites.
Après la période destinée à la conduite de l’enquête liée à une dénonciation de maltraitance, Cette protection devrait être complétée d’une clause considérant comme abusive toute résiliation donnée en raison de ladite dénonciation. Le congé donné par l’employeur en raison d’une dénonciation ou d’un signalement de maltraitance devrait, dans ce cas, être considéré comme abusif si cet employeur ne peut prouver qu’il avait un motif justifié pour résilier le contrat de travail. L’annulabilité de la résiliation du contrat de travail, telle que prévue par la Loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes (LEg) devrait aussi être introduite dans la CCT lorsque la dénonciation de maltraitance semble être le motif du licenciement.
Le combat d’arrière-garde mené par les employeurs pour préserver les prérogatives de quelques petits «roitelets» mécontents d’être critiqués doit être dénoncé. Il n’est en effet plus acceptable que des travailleurs/euses fassent l’objet de mesures de rétorsion suite à un signalement de situations d’inadéquation et/ou de maltraitance.
La défense des intérêts des travailleurs/euses étant bien évidemment un objectif prioritaire, notre organisation syndicale poursuivra la lutte pour que soient offertes, dans les meilleurs délais, des garanties de protection pour le personnel dénonçant des situations embryonnaires ou existantes de maltraitance.
Rémunération du personnel des hôpitaux régionaux (FHV)
Contrairement aux clauses de la CCT et à la pratique des autres faîtières signataires de la CCT du secteur sanitaire parapublic (AVDEMS, FEDEREMS, AVASAD), la Fédération des hôpitaux régionaux octroie à son personnel une augmentation annuelle correspondant à l’annuité de la classe d’engagement, alors que cette annuité devrait correspondre à celle de la classe salariale atteinte.
Cette pratique péjore de façon importante la rémunération du personnel de la FHV. Par exemple, la perte pour une infirmière (classe 17-19) durant la période de progression salariale s’élève à CHF 26’448.- (respectivement CHF 28’652.- / 13e salaire compris).
La Commission paritaire professionnelle (CPP) a été saisie par SUD concernant l’application de cet article 3.4 – Augmentation de salaire de la CCT. De l’avis d’une majorité des organisations représentées à la CPP, la pratique de la FHV n’est pas conforme à la CCT. De plus, cette pratique engendre une inégalité de traitement entre les collaboratrices et collaborateurs soumis.es à la même convention collective de travail.
A ce jour, la FHV n’a toujours pas décidé d’harmoniser sa pratique avec celle des autres faîtières signataires de la CCT. Pour leur part, les organisations professionnelles et syndicales s’emploient à éradiquer cette inégalité de traitement et revendiquent pour les travailleurs et travailleuses de la FHV l’octroi, dès le 1.1.2011, d’une augmentation annuelle correspondant à l’annuité de la classe salariale atteinte.
Durée du travail
Dans le bulletin APEMS/SUD d’octobre 2009, l’Association du personnel des EMS et la Fédération syndicale SUD revendiquaient le respect des droits des travailleuses et travailleurs en matière d’horaire de travail.
Ces revendications étaient les suivantes:
1. Les plans de travail du mois doivent être communiqués à chaque salarié.e par écrit au moins deux semaines à l’avance.
2. Une réglementation relative au système de comptabilisation du temps de travail doit être établie afin que le personnel puisse vérifier que le calcul des temps de travail, des congés, des vacances, des périodes de repos et des périodes d’absence en cas de maladie, accident, grossesse, maternité est conforme à la réalité et aux dispositions conventionnelles.
3. Les établissements soumis à la CCT doivent organiser pour leur personnel une présentation précise du système appliqué pour les décomptes des heures de travail effectuées, des congés, vacances etc. Cette présentation doit de plus être accompagnée d’une notice explicative détaillant le système appliqué aux décomptes horaires.
Au printemps 2010, SUD a sollicité la Commission paritaire professionnelle afin qu’elle intervienne auprès des établissements soumis à la CCT pour que ceux-ci délivrent à leurs employé.e.s les plans de travail par écrit, et informent leur personnel de façon détaillées concernant les décomptes horaires.
Cette démarche a incité toutes les organisations patronales (AVDEMS, FEDEREMS, AVASAD et FHV) à rappeler à chaque établissement les exigences de la CCT en matière de communication des plans de travail et concernant la comptabilisation des heures travaillées et/ou indemnisées, ainsi que concernant les jours de congé, les vacances etc. Ce courrier des organisations patronales était aussi destiné à recueillir toutes les informations utiles liées aux difficultés de mise en application des clauses conventionnelles relatives au calcul du temps de travail. Les résultats de cette enquête devraient être communiquées en septembre 2010.
Selon les premières informations communiquées par plusieurs travailleurs/euses du secteur sanitaire parapublic, les revendications des organisations professionnelles et syndicales ont déjà incité quelques établissements à se mettre en conformité, notamment concernant la communication par écrit des plans de travail.
Ces quelques résultats sont certes encourageant. Toutefois, les difficultés rencontrées par les professionnel. le.s de la santé concernant la manière dont sont établis et communiqués leurs horaires et comptabilisées leurs heures sont toujours aussi importantes. SUD et toutes les organisations syndicales concernées vont poursuivre les démarches et actions nécessaires pour que soient prises en compte ces légitimes revendications.
Salaire afférent aux vacances
-Bonne nouvelle !…
Après moult tergiversations et hésitations, les employeurs du secteur sanitaire parapublic ont enfin accepté le principe de l’introduction dans la CCT d’un article portant sur le salaire afférent aux vacances.
De quoi s’agit-il ?
L’article 329d du code des obligations (CO) stipule :
d. Salaire
1L’employeur verse au travailleur le salaire total afférent aux vacances et une indemnité équitable en compensation du salaire en nature.
Concernant cet article, une récente décision du Tribunal fédéral oblige les employeurs à verser, aussi pendant les vacances, les indemnités pour du travail effectué la nuit, le dimanche et les jours fériés et ce, pour autant que ces indemnités aient un caractère régulier et durable.
L’activité exercée dans les établissements sanitaires parapublics possède les caractéristiques de régularité et de durabilité mentionnées dans l’arrêt de la Cour civile du Tribunal fédéral. Ainsi, il devient évident que les suppléments à la rémunération de base versés en compensation du travail de nuit, du dimanche et des jours fériés doivent être pris en compte dans le calcul du salaire afférent aux vacances au sens de l’art. 329d al.1 CO pour la plupart des professionnel.le.s du secteur de la santé.
Il est donc vraisemblable que dès le 1.1.2011, cette disposition sera intégrée à la CCT, et que ces indemnités seront versées aussi pendant les vacances. Les modalités d’application de cette disposition font actuellement l’objet de négociation au sein de la CPP. Lorsqu’elles seront définitivement arrêtées, elles seront communiquées aux intéressé.e.s.