Nous avons sur le site de SUD un calculateur qui permet d’estimer vos pertes de rente en cas de réalisation du projet du Conseil d’Etat faisant passer le calcul de la situation actuelle (sur les trois dernières années) à un calcul sur la moyenne des 38 années d’activité nécessaires pour percevoir une rente avec les pleins droits. L’employeur a été obligé de reconnaitre, comme nous l’avions annoncé, que la baisse de la rente d’un système à l’autre était de 25%.
Mais voilà que dans sa Gazette, notamment, l’employeur entreprend de nous expliquer que cette baisse ne serait finalement que de 10% moyennant d’hypothétiques promotions dans la carrière (combien de promotions dans une carrière, on se le demande?) et une «revalorisation» des salaires pris en compte pour le calcul de la rente sur 38 ans d’activité.
On a là affaire à une très vaste opération d’enfumage. En effet, sur 38 ans, pour que le salaire de chaque année permette de garder son pouvoir d’achat au moment où il est perçu, il faut le revaloriser de l’équivalent du coût de la vie. L’indexation d’un salaire et l’intégration d’une annuité se font en effet l’année suivante. Si l’on prend tous les salaires d’une carrière pour calculer le montant du salaire assuré et donc la rente, on additionne des montants qui perdent de la valeur au fur et à mesure du déroulement de la carrière à cause du cumul de l’inflation. Un salaire de 5000.- hier n’a pas un pouvoir d’achat de 5000.- aujourd’hui.
Le Conseil d’Etat prétend compenser cette réduction du pouvoir d’achat par une « revalorisation » négociable tous les 5 ans. C’est cela qui permettrait de passer d’une perte de 25% à une perte d’environ 12%. Le reste devrait être gagné grâce aux fumeuses et hypothétiques promotions.
C’est ainsi qu’on arrive aux 10% de nos ami⋅e⋅s de la Gazette de l’Etat de Vaud.
Mais problème, BIG PROBLEME! L’Etat de Vaud ne met pas un sou pour ces dites «revalorisations». C’est la Caisse qui devrait mettre l’argent et prendre les décisions pour déterminer quelles «revalorisations» accorder si jamais il y en avait. Et vous vous demanderez, chers et chères ami⋅e⋅s, avec quel argent la caisse paiera puisque l’Etat prend une mesure qu’il ne finance pas? Et ce serait avec les produits des placements boursiers de la Caisse dont le Conseil d’Etat entend baisser de 4% à 3,25% la rentabilité.
Alors que la Caisse est contrainte par la législation fédérale à capitaliser à hauteur de 80% dans les 40 prochaines années, la possibilité de revaloriser à partir des bénéfices la perte de pouvoir d’achat des salaires relève de l’enfumage pur et simple.
Nous avons fait un petit calcul pour la classe 9. Sans «revalorisation», avec le projet du Conseil d’Etat, une rente avec plein droit se monterait à 55’410,5 CHF pour une carrière qui commencerait au 1er janvier 2014. Avec les «revalorisations» effectuées tous les 5 ans et payées par la Caisse de pensions, la rente se monterait à 65’354 CHF. Pour une moyenne d’une vingtaine d’années de vie, la CPEV devrait donc débourser sans aucune aide de l’employeur environ 200’000 CHF. Imaginons ce que cela va représenter pour des milliers de retraité⋅e⋅s, dès l’année prochaine. Ce sont des centaines et des centaines de millions que l’Etat promet sans avoir mis le premier sou et sans intention de mettre le premier fifrelin. Le salaire assuré sur une carrière, sans «revalorisation», toujours pour une classe 9, est de 3’509’329 CHF. Avec les «revalorisations», il se monterait à 4’139’095 CHF. Soit une différence de plus de 600’000 CHF à payer par les hypothétiques rendements des placements de la Caisse de pensions.
C’est exactement le même cas de figure que pour l’indexation des rentes versées. L’employeur public a transféré le problème à la Caisse sans y mettre le moindre argent. C’était le bénéfice des placements qui devait tout payer. Résultat: il n’y a plus d’indexation depuis des années, les rentes perdent progressivement de leur pouvoir d’achat. Plus on devient vieux, moins on a de pouvoir d’achat avec la rente.
C’est au transfert de cette opération de non-indexation des rentes à la revalorisation de nos salaires assurés que l’Etat prétend procéder. Il y aura naturellement le même résultat. Il n’y aura pratiquement pas de revalorisation. La perte de rente d’un système à l’autre est bien de 25%.
Mais naturellement l’enfumage ne s’arrête pas là. Alors que l’employeur public a toujours parlé de calcul effectué sur la base d’une indexation au coût de la vie de 1% par an, il refait tous ces calculs avec une indexation moyenne de 0,7% pour dissimuler la gravité des pertes. Il nous annonce ainsi que la variation de la rente entre la situation actuelle et son plan serait:
de – 0,6 % à 2 ans de la retraite,
de – 2,5 % à 5 ans,
de – 4,1 % à 8 ans,
et de – 6 % à 12 ans.
Ce n’est déjà pas mal. Mais bien entendu, si l’on reprend les 1 % d’indexation moyenne par an, nous arrivons:
à – 1,7% à 2 ans,
à – 4,1% à 5 ans,
à – 6,7% à 8 ans,
et à – 9,7% à 12 ans.
Ce sont les chiffres de l’employeur. Point n’est besoin d’insister pour percevoir la brutalité des coupes.